Meryem Cherkaoui au Mandarin Marrakech
Chef de file de la nouvelle cuisine marocaine, mon amie Meryem Cherkaoui dirige depuis le 3 octobre le restaurant signature du Mandarin Oriental Marrakech, le Mes'Lalla. Rencontre.
Comment avez-vous imaginé la carte du Mes'Lalla ?
Je fais d'abord ma cuisine, une cuisine marocaine contemporaine. La carte se décompose en deux parties : d'un côté, je revisite les classiques marocains, mais pas seulement les plats connus comme le poulet au citron ou la pastilla. Je revisite d'autres mets moins célèbres, des plats de paysans ou de pêcheurs, de tous les coins du Maroc. De l'autre, je propose une carte traditionnelle marocaine, servie dans des plats que j'ai fait faire par des artisans potiers. Nous avons la chance d'avoir un potager au Mandarin, cela nous permet d'avoir des légumes de saison et des herbes aromatiques sur place, un vrai luxe...
Quelle est votre vision de la cuisine marocaine contemporaine ?
Elle n'existe pas ! La cuisine marocaine se transmet de mère en fille et comme elle n'est pas codifiée, elle est amenée à se perdre. Elle s'est construite à partir d'influences berbères, arabo-andalouses et juives, mais depuis toute la création s'est arrêtée. Je suis la première à travailler dessus, depuis une quinzaine d'années. Ma cuisine, c'est de reprendre toutes les bases, de revoir les classiques.
Nous sommes très peu de chefs à être sur ce créneau là ici mais petit à petit ça vient. Dans nos écoles hôtelières, les jeunes apprennent d'abord la cuisine internationale, pas la cuisine marocaine, car elle n'est pas écrite. Au Maroc, il y a beaucoup de brasseries, des restaurants français, italiens, japonais, de marocains traditionnels, mais personne ne se lance sur la cuisine marocaine contemporaine c'est dommage. Même la nouvelle génération a la tentation de faire des choses plus internationales, vues ailleurs. Au contraire, c'est très enrichissant de la remettre au goût du jour...
Vous travaillez avec des petits producteurs, les choses changent dans ce sens au Maroc ?
Tous nos produits viennent à 100% du Maroc. Je travaille beaucoup avec des associations et coopératives. J'ai fait des recherches, entre autres pour ma marque Dima Terroir et trouvé une petite productrice de semoule aux 7 céréales, une super eau de fleur d'oranger faite traditionnellement... Les choses changent et nous avons de très bons produits. Les mères et grands-mères en avaient consciences mais tout le monde commence à s'en rendre compte. Des artisans fromagers se lancent, nous avons de la super volaille, les productions s'améliorent grâce notamment aux associations qui sont beaucoup aidées par le gouvernement afin d'améliorer la qualité et de permettre la commercialisation.
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